Evaluation de l’impact des nouvelles Directives et recommandations architecturales des établissements médico-sociaux vaudois (DAEMS) sur la satisfaction des usagers

Abstract

L’environnement construit contribue à influencer la santé des individus, selon l’Organisation Mondiale de la Santé. L’architecture des établissements médico-sociaux (EMS) peut, elle aussi, produire un impact sur le bien-être et la satisfaction des résident-e-s et des autres usagers. Dans le canton de Vaud, des normes architecturales de construction des EMS (les Directives et recommandations architecturales des établissements médico-sociaux, DAEMS) ont été créées en 2003 afin d’optimiser la conception des EMS par rapport aux besoins des usagers. Notre étude a pour but de vérifier si les EMS construits selon les DAEMS sont associés avec une satisfaction accrue des usagers par rapport aux EMS qui n’ont pas été construits selon ces directives.

Les DAEMSa ont fait l’objet d’une concertation pluridisciplinaire réunissant des représentants des Associations faîtières et des divers Services de l’Etat concernés dont un architecte. Ces directives ont comme objectif premier de proposer un cadre programmatique similaire pour l’ensemble des EMS vaudois, et de garantir ainsi une certaine forme d’équité et d’égalité de traitement. Autour de ce cadre de référence s’inscrivent les spécificités des missions et des philosophies des fondations exploitantes.

Les DAEMS quantifient et répertorient : les locaux affectés à l’hébergement et l’accompagnement des résident-e-s, au personnel soignant et administratif ainsi que les locaux et installations techniques, tout en prenant en considération la possibilité d’accueillir les visites des familles et des proches. Les DAEMS renvoient également au cadre légal et normatif en lien avec la construction de ce type d’édifice. Cela concerne notamment les exigences en matière de suppression d’obstacles architecturaux, de sécurité et de prévention des incendies. Concrètement, les DAEMS préconisent que 85 % des résident-e-s soient hébergés dans des chambres à 1 lit et fixent, toutes affectations confondues, à 68 m2 la surface brute de plancher minimale par résident.

Nous avons créé un questionnaire de satisfaction pour chacun des publics-cibles suivants (désignés collectivement sous le terme « d’usagers »): résident-e-s, proches de référence, et professionnel-le-s en EMS. Trente EMS ont participé à l’étude, à savoir 10 EMS construits selon les DAEMS (EMS « DAEMS ») et 20 EMS « témoins » (EMS « non-DAEMS »). Afin d’isoler au mieux le rôle joué par les DAEMS en matière de satisfaction, les EMS « non-DAEMS » ont été sélectionnés au moyen d’une méthode statistique permettant de maximiser leur similitude avec les EMS « DAEMS ». Pour l’analyse des résultats, les questions adressées aux résident-e-s ont été catégorisées selon sept thèmes, correspondant aux objectifs principaux des DAEMS : la satisfaction globale, le confort et la qualité architecturale de l’EMS, le respect de la sphère privée, les contacts sociaux, le respect et la dignité, la vie en EMS (repas, activités, soins du corps), et la mobilité et l’autonomie. Les proches des résident-e-s ont, en plus, été interrogés sur leur satisfaction par rapport à leurs visites, et les professionnel-le-s sur l’organisation du travail.

Nous avons interrogé 958 résident-e-s, 934 proches de résident-e-s, et 1'531 professionnel-le-s en EMS.

Pour les EMS de mission gériatrique et psychogériatrique compatible, les résultats montrent que tant les résident-e-s que les proches de référence et les professionnel-le-s se déclarent plus satisfaits pour l’ensemble des thèmes investigués lorsqu’ils font partie du groupe des EMS « DAEMS »b que lorsqu’ils font partie du groupe des EMS « non-DAEMS ». La différence la plus marquée concerne le thème « Sphère privée » chez les résident-e-s.

Pour les EMS de mission psychogériatrique spécialisée, une différence de satisfaction en faveur des EMS « DAEMS » s’observe également chez les professionnel-le-s. Les réponses recueillies chez les résident-e-s en psychogériatrie spécialisée ne permettent pas de mettre en évidence une différence de satisfaction statistiquement significative entre le groupe des EMS « DAEMS » et celui des EMS « non-DAEMS ».

Conclusions :

  • Pour les usagers des EMS de mission gériatrique et psychogériatrique compatible, faire partie du groupe des EMS « DAEMS » est associé avec une satisfaction accrue pour l’ensemble des thèmes investigués.
  • Pour les résident-e-s des EMS de mission gériatrique et psychogériatrique compatible, faire partie du groupe des EMS « DAEMS » est associé avec la perception d’une mobilité et d’une autonomie accrue.
  • Pour les professionnel-le-s des EMS de mission psychogériatrique spécialisée, faire partie du groupe des EMS « DAEMS » est associé avec une satisfaction accrue.
  • Pour les résident-e-s des EMS de mission psychogériatrique spécialisée et leurs proches, les réponses recueillies ne permettent pas de mettre en évidence une différence de satisfaction statistiquement significative entre le groupe des EMS « DAEMS » et celui des EMS « non-DAEMS ».

Pistes pour de futures investigations :

Il nous semblerait utile, au vu des résultats de notre évaluation, d’investiguer plus en détails quels sont les besoins architecturaux spécifiques des résident-e-s en psychogériatrie spécialisée. Au vu des difficultés rencontrées dans la communication avec ce public-cible, des approches qualitatives du type observation participante pourraient s’avérer judicieuses.

a Directives et recommandations architecturales des établissements médico-sociaux vaudois (DAEMS), Département de la santé et de l’action sociale du Canton de Vaud, Service de la santé publique, version 7.1 du 01/11/2003 (http://www.dsas.vd.ch/dossiers/EMS/daems.pdf).

b Nous utiliserons le terme « groupe » des EMS « DAEMS »/« non-DAEMS » (ou encore plus simplement la notion d’EMS « DAEMS »/« non-DAEMS ») pour caractériser les participant/es comme faisant partie d’une de ces deux catégories d’EMS. « Faire partie » d’un de ces groupes doit être compris comme : « être hébergé et vivre dans l’EMS » pour les résidents, « être employé et travailler dans l’EMS » pour les professionnel/les et « avoir un proche qui vit dans l’EMS » pour les proches.