Etat de mise en oeuvre des recommandations ‘Métasanté’ au quartier des Plaines-du-Loup (Lausanne)

Abstract

Le projet Métasanté s’inscrit dans le cadre du programme de construction et de réaménagement du tissu urbain Métamorphose lancé par la Ville de Lausanne en 2007 sur le site des Plaines-du-Loup (PDL). Ce projet visait à saisir cette opportunité urbanistique pour soutenir le développement d’un environnement favorable à l’activité physique dans une perspective de santé, via la formulation de recommandations concrètes fondées sur les données probantes et les apports d’un groupe multidisciplinaire d’expertes et d’experts.

Une décennie après la publication des 37 recommandations Métasanté (2014), et alors que la première étape de construction du quartier des PDL arrive à son terme, ce document revient sur ces recommandations avec une première analyse pragmatique à même de fournir des informations utiles au développement futur du quartier ou d’autres projets urbanistiques similaires. Pour ce faire, nous avons 

  • Estimé l’état de mise en oeuvre entre 2022 et 2024 de chacune des recommandations dans le quartier, au moyen d’une auto-évaluation réalisée en collaboration avec l’équipe du Bureau de Développement et projet Métamorphose (BDM) ;
  • Documenté et illustré cette mise en oeuvre lorsque cela était possible, ou les raisons expliquant l’absence de mise en oeuvre ;
  • Analysé l’état de mise en oeuvre des recommandations à la lumière du niveau de preuve disponible dans la littérature scientifique.

Les recommandations considérées comme ‘totalement’ ou ‘partiellement’ mises en oeuvre représentent deux tiers des recommandations (25/37, soit 68%). Les recommandations ‘totalement’ mises en oeuvre (14/37, 38%) concernent majoritairement les espaces publics extérieurs et leurs équipements, ainsi que la connexion aux transports publics. Les recommandations ‘partiellement’ mises en oeuvre (11/37, 30%) concernent majoritairement les emplacements des installations ; les obstacles techniques, liés à la rentabilité de l’espace ou à la faisabilité économique expliquant cette mise en oeuvre partielle. En l’état, une majorité des recommandations ‘totalement’ mises en oeuvre sont de niveau de preuve bas (i.e. avis d’expertes et experts). Les dix recommandations (27%) jugées ‘non mises en oeuvre’ concernent principalement certaines infrastructures extérieures et l’éclairage public. La majorité d’entre elles (9/10) sont toutefois considérées comme non pertinentes, en raison principalement de l’inadéquation de l’infrastructure proposée, ou des normes et nuisances aux habitantes et habitants.

Cette analyse révèle la pertinence globale des recommandations et leur adéquation par rapport aux besoins de la Ville de Lausanne et à l’environnement qu’elles concernent.

Ces résultats comportent cependant des limites et nécessiteraient d’être étayés voire confrontés par une méthodologie d’évaluation externe, fondée sur l’établissement de critères objectifs et menée en impliquant tant des expertes et experts en urbanisme et en santé publique que les usagères et usagers du quartier – avec un calendrier pertinent en regard de l’état de construction et d’aménagement du quartier, encore en cours (2025). Par ailleurs, cette analyse soulève plusieurs questions importantes concernant le transfert de connaissances entre les domaines de l’urbanisme et de la santé. Elle met en lumière les défis liés à la traduction concrète de recommandations de santé publique dans des projets urbanistiques, en particulier lorsque ces derniers doivent composer avec des enjeux politiques, économiques et techniques. Elle souligne ainsi la nécessité de développer un cadre méthodologique structuré, permettant de formuler des recommandations plus facilement intégrables dans les processus de planification. Un tel cadre devrait tenir compte des contraintes de calendrier, des réalités de terrain (notamment en termes de faisabilité technique et financière), ainsi que de l’acceptabilité des mesures pour les différentes parties prenantes. Enfin, ce travail invite à réfléchir à la place que peuvent réellement occuper les arguments de santé publique dans des projets d’urbanisme complexes, où les objectifs sont souvent multiples, parfois divergents, et nécessitent des arbitrages entre priorités sociales, économiques, politiques et environnementales en sus des priorités de santé.

L’auto-évaluation témoigne néanmoins en tous les cas, tant en termes de processus (implication et transparence de représentantes et représentants de la Ville de Lausanne dans la démarche) que de résultats, de la volonté de la Ville de Lausanne d’intégrer la problématique du mouvement et de l’activité physique dans l’architecture urbaine dans une optique de santé dans et pour toutes les politiques.