Consommation, prévention et industrie

Le tabagisme en Suisse. 

En Suisse

En 2017

  • 27 % de la population âgée de 15 ans et plus fument (dont 19 % quotidiennement). Ce chiffre est stable depuis 2007.
  • Les hommes (31%) sont plus nombreux à fumer que les femmes (23%).
  • Ce sont chez les 20 à 34 ans que l’on retrouve le plus grand nombre de fumeurs.
  • 89 % des fumeurs suisses consomment exclusivement ou principalement des cigarettes.
    • 10 cigarettes/jour : consommation moyenne, avec une grande disparité :
    • 1/5 personne fume moins d’une cigarette par jour
    • 1/5 personne fume plus de 20 cigarettes par jour
  • En 1992, la consommation moyenne était de 15 cigarette par jour
    • 15% consommation de cigares/cigarillos
    • 7% consommation de shisha
    • 6% consommation de cigarettes électronique

Les différences socio-démographiques sont importantes dans la consommation du tabac : la part des fumeurs est plus élevée chez les personnes sans emploi, avec un faible niveau de formation ou de nationalité étrangère. Ces constats sont vrais autant chez les femmes, que chez les hommes.

Décès liés aux tabac

Environ 9'500 décès en Suisse en 2017 (soit 1 décès sur 7) sont causés par la consommation de tabac.

Les principales causes de décès associés au tabagisme sont :

  • 44% : cancers,
  • 35% : maladies cardiovasculaires
  • 17% : bronchopneumopathies chronique obstructives.

Informations complémentaires

  • Système de monitorage suisse des addictions et des maladies non transmissibles - MonAM
Canton de Vaud

En 2017

  • 28 % de la population âgée de 15 et plus fume dans le canton (dont 21 % quotidiennement)
  • La proportion de fumeurs est similaire à la moyenne Suisse (27 %).
  • Tout comme le montrent les données fédérales, les hommes (32%) sont plus nombreux à fumer que les femmes (24 %).
  • Ce sont dans les catégories d’âges 25-34 ans (29%) et 45-54 ans (25%) que l’on retrouve le plus grand nombre de fumeurs.
  • Les personnes fumeuses du canton de Vaud consomment en moyenne 10 cigarettes par jour (9 pour les femmes et 11 pour les hommes). Comme le montrent les données nationales, la consommation de tabac est plus élevée chez les personnes avec un faible niveau de formation ou de nationalité étrangère.

Informations complémentaires

  • Plateforme d’information du système de santé vaudois - Infosan
  • Système de monitorage suisse des addictions et des maladies non transmissibles - MonAM
Concepts généraux

La prévention désigne l’ensemble des mesures qu’une société met en place pour :

  • Éviter la survenue ou la progression d’une maladie (p. ex. vaccination)
  • Réduire l’apparition des risques liés à certains comportements dangereux pour la santé (p.ex. tabagisme, alcool au volant)

Pour qu’elle soit efficace, les mesures de prévention cherchent à :

  • Réduire les facteurs de risques, en identifiant les éléments qui peuvent pousser des individus à adopter un comportement dangereux pour leur santé (p.ex. facilité d’accès aux produits, difficulté à gérer ses émotions, absence de soutien social)
  • Renforcer les facteurs de protection, en identifiant les éléments qui peuvent augmenter ou maintenir un état de bien-être et de santé, et ainsi « contrer » l’effet des facteurs de risques (p. ex. valeurs et normes sociales cohérentes et positives, compétences sociales et émotionnelles).

Les mesures de prévention peuvent se faire par des actions :

  • Auprès de personnes cibles, afin de renforcer leurs compétences en matière de santé. Les campagnes médiatiques de sensibilisation, la prévention par les pairs (p. ex. jeunes formés pour parler avec d’autres jeunes) sont des exemples de mesures de prévention comportementale.
  • Au niveau des structures, afin de créer des milieux de vie favorables à la santé. Les mesures législatives, l’aménagement de l’environnement sont des exemples de mesures de prévention structurelle.

Une plus grande efficacité est atteinte lorsque les mesures de prévention comportementale et structurelle sont combinées.

Informations complémentaires

Acteurs de la prévention du tabagisme

Confédération : définit la stratégie globale pour le Fonds de prévention du tabagisme. Ce dernier soutient « les acteurs publics et privés dans leurs démarches de créer des conditions cadres favorables à la santé de tous les individus et de réduire la part de personnes consommant du tabac et de la nicotine » ;

Cantons : mettent en œuvre les programmes cantonaux de prévention du tabagisme par le biais de mesures de prévention comportementale et structurelle ;

Organisations non gouvernementales (ONG), associations spécialisées et acteurs privés : sont actifs au niveau de l’aide à la désaccoutumance (conseil et thérapie), de la recherche, de l’information au public ou encore des interventions politiques.

Ces acteurs collaborent ensemble avec pour objectif de diminuer le nombre de cas de maladie et de décès dus au tabagisme.

Succès de la prévention du tabagisme entre 2002 et 2018
  • Diminution de 60% de la prévalence de consommation de tabac chez les 11-15 ans ;
  • Diminution de 70% de la part de la population suisse, exposée au tabagisme passif durant plus d’1 heure par jour ;
  • Ne pas fumer devient de plus en plus une norme sociale.
Retard dans la prévention du tabagisme

Par rapport à l’Europe, la Suisse est en retard dans la prévention du tabagisme. Elle est l’un des rares pays à ne pas avoir ratifié la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. Celle-ci recommande la mise en place de nombreuses mesures efficaces, tirés du programme « MPOWER » :

  • « Monitor » : surveiller la consommation du tabac et les politiques de prévention
  • « Protect »: protéger la population contre la fumée du tabac
  • « Offer » : offrir une aide à celles et ceux qui souhaitent arrêter de fumer
  • « Warn » : alerter la population sur les dangers du tabagisme
  • « Enforce » : faire respecter les interdictions de publicité en faveur du tabac, de promotion et de parrainage
  • « Raise » : augmenter les taxes sur le tabac

Parler du tabac avec ses patients et bénéficiaires

Historique

17ème siècle : apparition des premiers champs de tabac en Suisse

1945 : plus de 6'000 planteurs cultivant une surface de 1'450 hectares

2022 : 135 planteurs cultivant une surface de 400 hectares. Cela représente moins de 0,03 % des surfaces agricoles cultivées. 85% des cultures se situent dans la Broye vaudoise et fribourgeoise. Le tabac produit est de mauvaise qualité (notamment en raison du climat) et est surtout utilisé pour donner du volume aux cigarettes et cigares.

Raisons de la persistance de la culture du tabac

La culture du tabac en Suisse est soutenue financièrement par le fonds SOTA (Société coopérative pour l’achat du tabac indigène). Ce fonds est alimenté par :

  • l’imposition sur les produits du tabac : environ 13 millions de francs par an ;
  • l’industrie du tabac : environ 3,5 millions de francs par an.

Un hectare de champ de tabac rapporte ainsi plus de 40'000 francs par an !

Cet argent permet à l’industrie du tabac d’entretenir un fort lien avec le monde paysan et politique. Ces liens rendent l’acceptation politique des mesures de prévention du tabagisme plus difficile.

Convention-cadre de l’OMS non ratifiée

Ce traité, qui énonce notamment les mesures pour réduire l’offre du tabac, invite les États à aider les tabaculteurs à se reconvertir dans d’autres types de cultures vivrières et plus saines. La Suisse ne l’a toujours pas ratifié.

Géants du tabac

Trois géants du tabac se partagent le marché suisse, et une grande partie du marché mondial. Ils ont leur siège international et leur usine de production en Suisse :

  • Phillip Morris International (PMI), Neuchâtel
  • British American Tobacco (BAT), Boncourt, Jura
  • Japan Tobacco International (JTI), Dagmersellen, Lucerne

En 2016, ces industries ont produit près de 35 milliards de cigarettes, dont les ¾ ont été exportées.

En raison d’une législation permissive, ces multinationales exportent, notamment en Afrique et en Asie, des cigarettes avec de fortes teneurs en goudron et nicotine, dont la vente en Suisse et dans l’Union européenne est interdite.


Pratiques d’influence

L’industrie du tabac utilise différents moyens pour bloquer les mesures de prévention et protéger ses intérêts au détriment de ceux de la santé publique. Elle cherche à influencer les responsables politiques, les médias, les consommateurs et le grand public.

Lobbying politique
  • En Suisse, le lobbying de l’industrie du tabac est extrêmement puissant. Cette pratique est légale pour autant qu’elle respecte plusieurs principes. L’un d’entre eux est celui de la transparence.
  • Bien que plusieurs parlementaires soient des lobbyistes pour l’industrie du tabac, leurs liens d’intérêts n’ont pas tous fait l’objet de déclaration. Ces mêmes personnes peuvent par ailleurs faire entrer d’autres lobbyistes au Parlement fédéral, sans que leur affiliation ne soit communiquée.
  • En 2021, un indice mondial mesurant les efforts déployés par les gouvernements pour lutter contre l’influence de l’industrie du tabac dans les décisions politiques classe la Suisse en avant dernière position (79ème sur 80 États). Cette position montre qu’en Suisse les intérêts économiques priment sur la santé publique.
Développement d’activités « socialement responsables »
  • L’industrie du tabac cherche à intégrer dans sa communication les problématiques sociales, environnementales et économiques. Il est ainsi fréquent de la voir s’engager contre la pauvreté, le travail des enfants, pour l’accès à l’éducation ou encore la protection de l’environnement.
  • Par ses actions de « blanchiment moral », elle cherche à tisser une relation de confiance avec ses partenaires, les responsables politiques et le public, tout en espérant faire échouer les programmes de lutte anti-tabac.
  • Les dommages causés par le tabagisme, qui tue 1 consommateur sur 2, restent bien supérieurs aux actions « socialement responsables » et de philanthropie.
Utilisation d’organisations tierces
  • L’industrie du tabac crée des alliances avec d’autres acteurs, présentés comme indépendants, crédibles et avec une meilleure image pour s’exprimer et prendre position à sa place.
  • Dans les années 1990, l’industrie du tabac a formé une coalition avec celle du vin afin de faire échouer l’initiative populaire visant à interdire la publicité pour le tabac et l’alcool. Lors de cette campagne, les cigarettiers sont volontairement restés en retrait afin de laisser l’industrie du vin s’exprimer pour profiter de la bonne considération dont elle bénéficie dans la société et la culture suisse.
Intrusion dans la recherche et désinformation
  • L’industrie du tabac finance des chercheurs pour qu’ils mènent des études minimisant les dangers du tabagisme ou démontrant l’inefficacité des mesures de prévention.
  • L’affaire « Rylander » illustre l’infiltration de l’industrie du tabac dans la science. Ce chercheur suédois, qui travaillait à l’Université de Genève, était secrètement employé par Philip Morris pour conduire des recherches niant les effets du tabagisme passif. Il a été condamné en 2003 par la Cour de justice de Genève pour « fraude scientifique sans précédent, dans le domaine du tabagisme passif ».
Argument économique
  • L’industrie du tabac affirme être importante pour l’économie suisse, puisque l’imposition du tabac rapporte 2 milliards par année à la Confédération.
  • Cet argument est à mettre en balance avec les 5 milliards de francs dépensés chaque année pour prendre en charge les traitements médicaux et les pertes de productivité associés (chiffre 2017). Cela représente un coût annuel d’environ 500 francs par habitant.
  • Par ailleurs, une diminution du tabagisme n’induit pas une baisse, mais une augmentation des places de travail. L’argent épargné est en effet investi dans d’autres secteurs d’activités (restauration, loisirs, etc.).
Objectifs

La Suisse est l’un des pays européens dans lesquels les stratégies marketing en faveur des produits du tabac sont les plus courantes et efficaces. Ces dernières cherchent à :

  • Attirer de nouveaux fumeurs, notamment les jeunes pour compenser les personnes qui arrêtent de fumer ou décèdent ;
  • Augmenter (ou maintenir) la consommation de tabac chez les fumeurs ;
  • Démotiver les fumeurs qui souhaitent arrêter ;
  • Encourager les anciens fumeurs à reprendre.
Techniques actuelles de marketing en Suisse
  • Publicité dans les points de vente de tabac (y compris les automates à cigarettes), la presse, les bars, cafés et boîtes de nuit ;
  • Sponsoring d’événements culturels (p. ex. festivals avec la présence de Japan Tobacco International à Paléo ou de British American Tobacco au Montreux Jazz) ;
  • Publication de contenus sur les réseaux sociaux ou par l’emploi d’influenceurs·euses ;
  • Marketing personnalisé sur les sites internet officiels (p. ex. proposer des expériences uniques après la collecte de données personnelles) ;
  • Distribution d’échantillons gratuits, concours et jeux promotionnels avec prix, etc.
Cibler les jeunes
  • Les publicités présentent souvent des jeunes personnes, heureuses, dans des situations de vie qu’ils valorisent : entourées d’ami·e·s, prenant des risques, profitant de moments de liberté, recherchant l’indépendance, etc.
  • Cette stratégie a pour objectif d’amener le consommateur à s’identifier à une marque de tabac, tout en rendant l’acte de fumer attrayant et socialement accepté. Rien n’est laissé au hasard : l’emploi du tutoiement, de visuels décalés, de couleurs vives ou encore la présence de hashtags.
  • Même si la publicité adressée aux moins de 18 ans est interdite en Suisse, les jeunes y sont continuellement exposé·e·s. En 2014, l’Observatoire des stratégies marketing pour les produits du tabac en Suisse Romande a constaté qu’un·e jeune était exposé·e en moyenne à 68 stimuli pro-tabac sur une journée de week-end, dont les 2/3 était présenté sous la forme de publicité.
Cible principale des industries

Outre les caractéristiques biologiques liées aux transformations qui se produisent lors de la puberté, il existe une vulnérabilité psychologique propre à l’adolescence qui explique pourquoi les addictions commencent souvent à cette période de la vie. A noter que la grande majorité des fumeurs adultes (87%) a commencé sa consommation avant 21 ans. La probabilité de commencer à fumer est ainsi faible une fois passé cet âge.

Contrairement aux idées reçues, la grande majorité des jeunes ne fume pas. Les jeunes qui fument deviennent cependant plus vite dépendants au tabac que les adultes. Plus on commence à fumer jeune, plus le risque de devenir un fumeur régulier est grand et plus il sera difficile d’arrêter.

Pour toutes ces raisons, les jeunes constituent le principal public cible de l’industrie du tabac.

Informations complémentaires

Ressources pour les professionnel·les

Comment aborder la question du tabac avec les jeunes? A partir de quel âge? Et de quelle manière? Faut-il faire peur? Vous trouverez de nombreux éléments de réponse sur le site Tabac sans Tabou.

Ce site internet, pensé sous la forme d’une boîte à outils, centralise les informations, les messages clés à transmettre et divers outils d’animation existants dans le domaine de la prévention du tabagisme auprès des jeunes.

Parler du tabac avec les jeunes

Pollution liée au tabac

Au-delà de tuer plus de 8 millions de personnes chaque année dans le monde, le tabac détruit aussi l’environnement.

La production de tabac nécessite en effet chaque année :

  • La déforestation d’importantes surfaces agricoles (environ 600 millions d’arbres), équivalent à la superficie de la Suisse. L’utilisation de ces surfaces, pour des cultures vivrières, permettrait de nourrir plus de 10 millions de personnes ;
  • 22 milliards d’eau (1 tonne de tabac nécessite 670 tonnes d’eau, ce qui est 8 fois plus important que la quantité utilisée pour produire 1 tonne de pommes de terre) ;
  • Le recours à des engrains et pesticides, qui polluent les terres, les rivières, les nappes phréatiques et l’air, et représentent un fort danger pour la biodiversité ;
  • 8 millions de tonnes de bois pour le séchage des feuilles.

Selon l’OMS, le tabac produit 84 millions de tonnes de CO2 chaque année. Plus de la moitié de ces émissions provient du séchage des feuilles de tabac (dessiccation). Ces dernières ont un impact considérable sur le réchauffement climatique.

Chaque année, plus de 4’000 milliards de mégots sont disséminés dans la nature. Leur dégradation prend plusieurs années. Tout au long de ce processus, les substances contenues dans les filtres usagés (p. ex. nicotine, métaux lourds) polluent les villes, la faune et la flore, et en particulier le milieu marin.

Dans le cadre de la journée mondiale sans tabac 2022 de l’OMS, les Romand·e·s ont été questionné·e·s sur la thématique « Le tabac : une menace pour notre environnement ». Les résultats de cette enquête montrent que les sondé·e·s connaissent bien la pollution liée aux mégots, mais sous-estiment l’empreinte écologique et climatique associée à la culture du tabac.

Dernière mise à jour: 12.12.2023